Cadre juridique des énergies marines renouvelables : entre défis et opportunités

Le développement des énergies marines renouvelables (EMR) s’inscrit dans un contexte de transition énergétique mondiale. Face à l’urgence climatique, ces technologies représentent une alternative prometteuse aux énergies fossiles. La France, avec ses 11 millions de km² d’espaces maritimes, dispose d’un potentiel considérable. Pourtant, le déploiement des EMR se heurte à un cadre juridique complexe, situé à l’intersection du droit maritime, du droit de l’environnement et du droit de l’énergie. Cette complexité soulève des questions fondamentales sur l’articulation entre exploitation économique, protection des écosystèmes marins et usages préexistants de l’espace maritime.

La qualification juridique des énergies marines renouvelables dans le paysage normatif français

Les énergies marines renouvelables englobent diverses technologies exploitant les ressources énergétiques des mers et océans. Le Code de l’énergie les intègre dans son article L.211-2 comme composante des énergies renouvelables, mais sans leur consacrer un régime spécifique complet. Cette catégorie regroupe l’énergie houlomotrice (vagues), marémotrice (marées), hydrolienne (courants), éolienne offshore (fixe ou flottante), l’énergie thermique des mers et l’osmotique (gradient de salinité).

La loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015 a marqué un tournant significatif en fixant un objectif de 40% d’électricité renouvelable dans le mix énergétique français d’ici 2030. La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) précise ces ambitions avec des objectifs chiffrés pour l’éolien en mer : 2,4 GW en 2023 et entre 5,2 et 6,2 GW en 2028.

D’un point de vue juridique, les EMR se situent à la croisée de plusieurs régimes. Elles relèvent du droit de l’énergie pour la production électrique, du droit maritime pour l’occupation du domaine public maritime, et du droit de l’environnement pour l’évaluation de leurs impacts écologiques.

Un encadrement normatif multiniveau

L’encadrement juridique des EMR s’articule sur plusieurs échelles :

  • Au niveau international : La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (Montego Bay, 1982) définit les droits souverains des États sur leurs zones économiques exclusives, incluant la production d’énergie.
  • Au niveau européen : La directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et le Pacte vert européen fixent des objectifs ambitieux.
  • Au niveau national : Le Code de l’énergie, le Code de l’environnement et le Code général de la propriété des personnes publiques constituent le socle législatif.

Cette superposition normative crée parfois des tensions entre les objectifs de développement économique et ceux de protection environnementale. Le Conseil d’État a d’ailleurs été saisi à plusieurs reprises pour trancher des conflits relatifs aux projets d’EMR, notamment dans l’arrêt du 13 juillet 2012 concernant le parc éolien offshore de Saint-Brieuc.

La qualification juridique des EMR détermine le régime d’autorisation applicable. Ainsi, l’ordonnance n°2016-1687 du 8 décembre 2016 relative aux espaces maritimes a clarifié les règles d’implantation des installations en mer, tandis que le décret n°2016-9 du 8 janvier 2016 a instauré une autorisation unique pour les installations de production d’énergie renouvelable en mer.

L’occupation du domaine public maritime : un enjeu central pour le déploiement des EMR

L’implantation d’installations d’énergies marines renouvelables nécessite l’occupation d’espaces maritimes relevant généralement du domaine public maritime (DPM). Ce statut juridique particulier, régi par le Code général de la propriété des personnes publiques, implique des contraintes spécifiques pour les développeurs de projets.

Le DPM se caractérise par les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité, qui interdisent toute cession définitive et toute appropriation par prescription acquisitive. Pour implanter des infrastructures EMR, les opérateurs doivent donc obtenir une concession d’utilisation du domaine public maritime (CUDPM), encadrée par les articles R.2124-1 à R.2124-12 du CGPPP.

La procédure d’attribution des concessions a été substantiellement modifiée par la loi n°2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, puis par la loi n°2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP). Ces réformes ont introduit le principe du « permis enveloppe » qui permet d’ajuster les caractéristiques du projet après l’autorisation initiale, dans certaines limites prédéfinies.

La procédure de mise en concurrence

L’attribution des concessions pour les projets commerciaux d’EMR se fait généralement par appel d’offres, organisé par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Cette procédure comporte plusieurs phases :

  • L’identification des zones propices par l’État, après concertation avec les acteurs locaux
  • La publication d’un cahier des charges détaillant les exigences techniques, environnementales et financières
  • L’évaluation des offres selon des critères pondérés (prix, qualité technique, impact environnemental)
  • La désignation du lauréat par le ministre chargé de l’énergie

Le Tribunal administratif de Nantes, juridiction spécialisée dans le contentieux des EMR depuis le décret n°2016-9, a rendu plusieurs décisions structurantes sur la régularité de ces procédures, notamment dans l’affaire du parc éolien offshore de Saint-Nazaire (jugement du 18 juin 2017).

La durée des concessions constitue un enjeu économique majeur. Elle est généralement de 30 à 40 ans pour les parcs éoliens en mer, afin de permettre l’amortissement des investissements considérables (environ 2 milliards d’euros pour un parc de 500 MW). À l’expiration de la concession, le démantèlement des installations est obligatoire, sauf dérogation explicite, conformément à l’article L.181-23 du Code de l’environnement.

La redevance domaniale due pour l’occupation du DPM représente une ressource financière pour l’État, mais son montant fait l’objet de débats. Le Conseil d’État, dans sa décision du 11 avril 2019, a précisé que cette redevance doit tenir compte des avantages de toute nature procurés au concessionnaire, incluant les subventions publiques comme le complément de rémunération.

Les procédures environnementales : concilier transition énergétique et préservation des écosystèmes marins

Les projets d’énergies marines renouvelables s’inscrivent dans une démarche de lutte contre le changement climatique, mais leur implantation n’est pas sans conséquence sur les écosystèmes marins. Cette dualité place les EMR au cœur d’un paradoxe environnemental qui se traduit par un cadre réglementaire exigeant.

Tout projet d’EMR est soumis à une étude d’impact environnemental approfondie, conformément à l’article R.122-2 du Code de l’environnement. Cette étude doit analyser les effets du projet sur la biodiversité marine, les habitats benthiques, l’avifaune, les mammifères marins, mais aussi sur le paysage maritime, le patrimoine culturel sous-marin et les activités socio-économiques préexistantes.

La loi pour la reconquête de la biodiversité de 2016 a renforcé les exigences en introduisant le principe de solidarité écologique et en consacrant la séquence ERC (Éviter-Réduire-Compenser) comme méthodologie incontournable. Pour les EMR, cette séquence implique :

  • Éviter : Choix de sites d’implantation hors des zones à forte sensibilité écologique
  • Réduire : Adaptation des techniques de construction pour minimiser le bruit sous-marin ou installation de dispositifs d’effarouchement pour l’avifaune
  • Compenser : Création de récifs artificiels ou restauration d’habitats marins équivalents à ceux dégradés

L’articulation avec les zones de protection

La coexistence des EMR avec les aires marines protégées soulève des questions juridiques complexes. Le réseau Natura 2000 en mer, institué par les directives européennes Habitats-Faune-Flore (92/43/CEE) et Oiseaux (2009/147/CE), couvre une part croissante des eaux territoriales françaises.

L’implantation d’EMR dans ou à proximité de ces zones n’est pas interdite per se, mais requiert une évaluation d’incidences Natura 2000 spécifique. Le Conseil d’État, dans son arrêt du 6 décembre 2017 relatif au parc éolien offshore de Fécamp, a précisé que cette évaluation doit démontrer l’absence d’effet significatif sur les objectifs de conservation du site. À défaut, le projet ne peut être autorisé qu’en l’absence de solution alternative, pour des raisons impératives d’intérêt public majeur, et moyennant des mesures compensatoires adéquates.

Le Document Stratégique de Façade (DSF), instauré par la directive-cadre Stratégie pour le milieu marin (2008/56/CE), tente d’apporter une réponse à ces conflits potentiels en planifiant l’espace maritime. Il identifie des zones propices au développement des EMR tout en préservant les zones écologiquement sensibles.

La surveillance environnementale constitue une obligation légale pour les exploitants d’EMR. Elle doit être mise en œuvre avant la construction (état initial), pendant les travaux, et tout au long de l’exploitation. Les résultats de ce suivi peuvent conduire à l’adaptation des mesures ERC initialement prévues, selon un principe de gestion adaptative consacré par l’ordonnance n°2019-784 du 24 juillet 2019.

La régulation économique et financière des projets d’EMR

Le développement des énergies marines renouvelables nécessite des investissements considérables que le marché seul ne peut soutenir à ce stade de maturité technologique. Un cadre économique et financier spécifique a donc été élaboré pour sécuriser ces investissements tout en maîtrisant la dépense publique.

Le principal mécanisme de soutien est le complément de rémunération, institué par l’article L.314-18 du Code de l’énergie. Ce dispositif garantit aux producteurs d’EMR un niveau de revenu prédéfini par mégawattheure produit. Concrètement, lorsque le prix de marché est inférieur au tarif de référence fixé dans l’appel d’offres, EDF verse la différence au producteur. À l’inverse, lorsque le prix de marché dépasse ce tarif, le producteur reverse l’excédent à EDF.

L’évolution des prix observée lors des appels d’offres successifs témoigne d’une baisse significative des coûts de production : de 200 €/MWh pour les premiers appels d’offres éoliens offshore en 2012 à moins de 50 €/MWh pour les appels d’offres récents. Cette tendance a conduit la Commission de régulation de l’énergie (CRE) à revoir ses méthodes d’évaluation des charges de service public liées aux EMR.

La fiscalité spécifique aux EMR

Les installations d’EMR sont soumises à une fiscalité particulière, notamment la taxe spéciale sur les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale (article 1519 B du Code général des impôts). Son produit est réparti entre :

  • Les communes littorales d’où les installations sont visibles (50%)
  • Le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (35%)
  • L’Office français de la biodiversité (15%)

Cette répartition vise à compenser les impacts locaux et sectoriels des projets EMR, en particulier pour les pêcheurs professionnels dont l’activité peut être affectée. Des négociations sont souvent menées pour établir des conventions de cohabitation entre EMR et pêche, comme celle signée en 2020 entre le Comité régional des pêches de Normandie et le consortium développant le parc éolien de Dieppe-Le Tréport.

Le raccordement des installations au réseau électrique représente un coût significatif, estimé entre 10% et 15% de l’investissement total. Depuis la loi n°2017-1839 du 30 décembre 2017 (loi hydrocarbures), ce raccordement est à la charge du gestionnaire de réseau, RTE (Réseau de Transport d’Électricité), et non plus du producteur. Ce transfert de responsabilité a permis de réduire les risques pour les développeurs et d’abaisser le coût global des projets.

La valorisation des externalités positives des EMR reste un défi juridique. La loi climat et résilience du 22 août 2021 a introduit la possibilité de valoriser les services rendus à l’environnement par certaines infrastructures, mais les modalités pratiques pour les EMR restent à définir. Des réflexions sont en cours sur l’intégration de la valeur de la tonne de CO2 évitée dans les analyses coûts-bénéfices des projets.

Vers une gouvernance maritime intégrée : les défis juridiques de demain

L’avenir des énergies marines renouvelables en France dépendra largement de notre capacité à faire évoluer le cadre juridique pour relever plusieurs défis majeurs. Le principal enjeu réside dans l’élaboration d’une véritable gouvernance maritime intégrée, capable de concilier les différents usages de la mer tout en accélérant la transition énergétique.

La planification spatiale maritime, introduite par la directive 2014/89/UE et transposée dans le droit français par l’ordonnance n°2016-1687, constitue un premier pas dans cette direction. Les Documents Stratégiques de Façade (DSF) et les Plans d’Action pour le Milieu Marin (PAMM) tentent d’organiser la coexistence des activités maritimes selon une approche écosystémique. Toutefois, leur mise en œuvre se heurte à des conflits d’usage persistants.

Le Conseil Maritime de Façade (CMF), instance consultative rassemblant l’ensemble des parties prenantes (État, collectivités, professionnels de la mer, associations environnementales), joue un rôle croissant dans cette gouvernance. Sa composition et ses attributions ont été renforcées par le décret n°2019-1580 du 31 décembre 2019. Néanmoins, son influence réelle sur les décisions finales reste limitée.

Les innovations juridiques nécessaires

Plusieurs innovations juridiques semblent nécessaires pour accompagner le développement des EMR :

  • La création d’un guichet unique pour les autorisations administratives, au-delà des simplifications déjà opérées
  • L’élaboration d’un régime juridique spécifique pour les technologies émergentes comme l’hydrolien ou le houlomoteur
  • La définition d’un cadre pour les projets multi-usages combinant EMR et autres activités (aquaculture, tourisme)
  • L’adaptation du droit à l’éolien flottant, dont le statut oscille entre navire et installation fixe

La question des interconnexions transfrontalières représente un défi juridique particulier. Des projets comme North Seas Energy Cooperation visent à créer un réseau électrique maillé en mer du Nord, reliant plusieurs parcs éoliens offshore et plusieurs pays. Ces infrastructures hybrides nécessitent une harmonisation des cadres réglementaires nationaux et une clarification du statut des câbles sous-marins.

Le démantèlement des installations en fin de vie constitue un autre enjeu d’avenir. L’obligation de remise en état du site est inscrite dans l’article L.181-23 du Code de l’environnement, mais ses modalités précises restent à définir. Des garanties financières sont exigées des exploitants, mais leur montant fait débat. L’arrêté du 22 juin 2020 a précisé les règles applicables aux éoliennes terrestres, mais un texte équivalent pour les installations marines fait encore défaut.

La propriété intellectuelle liée aux EMR mérite une attention particulière dans un contexte de compétition technologique mondiale. Le droit des brevets s’applique naturellement aux innovations dans ce domaine, mais la protection des données environnementales collectées par les développeurs soulève des questions spécifiques. La directive 2019/1024 sur les données ouvertes promeut leur réutilisation, ce qui pourrait accélérer l’innovation tout en réduisant les coûts des études d’impact.

Enfin, la jurisprudence joue un rôle déterminant dans l’évolution du droit des EMR. Les recours contentieux contre les projets ont permis de clarifier plusieurs points cruciaux, comme la portée du principe de précaution ou les exigences en matière de participation du public. Le Conseil d’État, dans sa décision du 15 avril 2021 relative au parc éolien de Courseulles-sur-Mer, a validé l’approche du « permis enveloppe » tout en rappelant les limites de l’adaptabilité des projets après autorisation.

La réforme du contentieux des énergies renouvelables initiée par la loi d’accélération des énergies renouvelables du 10 mars 2023 vise à raccourcir les délais de jugement et à limiter les recours abusifs. Elle prévoit notamment une présomption d’urgence pour les référés-suspension contre les autorisations EMR et un délai de recours réduit à deux mois pour les tiers.

Perspectives d’évolution du cadre juridique des EMR

L’avenir du droit des énergies marines renouvelables se dessine à travers plusieurs tendances de fond qui transformeront profondément ce secteur dans les prochaines années. Ces évolutions répondent à la nécessité d’accélérer le déploiement des EMR tout en renforçant leur acceptabilité sociale et environnementale.

La loi d’accélération des énergies renouvelables du 10 mars 2023 marque un tournant significatif en introduisant plusieurs innovations juridiques. Parmi celles-ci, la planification territoriale est renforcée avec l’identification de « zones d’accélération » pour les EMR. Cette approche descendante (top-down) est complétée par une dimension ascendante (bottom-up) permettant aux collectivités territoriales de proposer des zones propices sur leur territoire maritime.

Le partage de la valeur constitue un autre axe majeur de cette réforme. Au-delà de la fiscalité existante, la loi prévoit des mécanismes de redistribution des bénéfices générés par les EMR vers les territoires d’implantation et leurs habitants. Cette approche s’inspire des modèles développés dans d’autres pays européens comme le Danemark, où les communautés locales peuvent acquérir jusqu’à 20% du capital des parcs éoliens en mer.

L’internationalisation du droit des EMR

L’influence croissante du droit international sur le cadre juridique des EMR est indéniable. Le Traité sur la haute mer, adopté en mars 2023 après plus de quinze ans de négociations, établit un régime de protection de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales. Ce texte pourrait affecter le développement futur des EMR dans les eaux internationales, notamment pour l’éolien flottant.

Au niveau européen, le paquet « Fit for 55 » adopté en 2023 renforce considérablement les ambitions en matière d’énergies renouvelables, avec un objectif de 42,5% dans le mix énergétique d’ici 2030. Pour les EMR spécifiquement, la stratégie européenne pour les énergies renouvelables en mer fixe un objectif de 60 GW d’éolien offshore et 1 GW pour les autres technologies marines d’ici 2030.

Cette internationalisation se traduit par une harmonisation progressive des cadres juridiques nationaux. Le règlement européen 2022/869 sur les infrastructures énergétiques transfrontalières facilite le développement de projets d’intérêt commun, incluant les EMR. Il instaure des procédures d’autorisation coordonnées et des mécanismes de partage des coûts entre États membres.

La normalisation technique joue également un rôle croissant dans la structuration juridique du secteur. Les travaux de l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) et du Comité Européen de Normalisation (CEN) établissent des standards qui s’imposent progressivement comme références dans les cahiers des charges et les autorisations administratives.

L’émergence d’un droit adapté aux nouvelles technologies

Les technologies émergentes d’EMR, comme l’énergie thermique des mers ou l’énergie osmotique, nécessitent un cadre juridique adapté à leurs spécificités. Le législateur français a commencé à prendre en compte cette diversité technologique, notamment dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015, mais des ajustements restent nécessaires.

L’hydrogène renouvelable produit en mer représente une perspective prometteuse à l’intersection des EMR et des nouveaux vecteurs énergétiques. L’ordonnance n°2021-167 du 17 février 2021 a posé les bases d’un régime juridique pour cette filière, mais son application aux installations offshore soulève des questions spécifiques, notamment en termes de sécurité et de transport.

Les îles énergétiques, concept développé notamment par le Danemark et les Pays-Bas, constituent une innovation de rupture combinant production d’électricité, stockage et interconnexion. Leur statut juridique hybride, entre infrastructure énergétique et territoire artificiel, nécessitera probablement des adaptations du droit maritime et du droit de l’énergie.

Le stockage d’énergie en mer, qu’il s’agisse de batteries ou de systèmes comme l’air comprimé sous-marin (CAES), représente un complément indispensable aux EMR intermittentes. La loi Énergie-Climat de 2019 a clarifié le statut juridique du stockage d’électricité, mais son application au milieu marin reste à préciser.

Face à ces évolutions technologiques rapides, le droit devra trouver un équilibre entre stabilité juridique nécessaire aux investissements et souplesse pour accompagner l’innovation. Des mécanismes comme le « bac à sable réglementaire » (regulatory sandbox), introduit par la loi PACTE de 2019 pour certains secteurs, pourraient être étendus aux EMR pour expérimenter des cadres juridiques adaptés avant leur généralisation.

L’intégration des EMR dans une vision plus large de planification énergétique constitue un défi majeur. La prochaine Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (2024-2033) devra proposer une trajectoire ambitieuse mais réaliste pour ces technologies, en tenant compte des contraintes de réseau, des enjeux environnementaux et des capacités industrielles nationales.

En définitive, le droit des EMR se trouve à un moment charnière de son développement. D’un ensemble disparate de normes issues de différentes branches du droit, il évolue progressivement vers un corpus juridique cohérent et spécifique. Cette maturation juridique accompagne et conditionne la maturation industrielle et technologique du secteur, dans un contexte d’urgence climatique qui rend ces évolutions particulièrement stratégiques.